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LES STATUTS DE BOLOGNE (1248)


Traduit du latin.


Voici les Statuts et Règlements de la Société des Maîtres du mur et de la charpente, faits en l’honneur de Dieu, de Notre Seigneur Jésus-Christ, de la Bienheureuse Vierge Marie et de tous les saints, et pour l’honneur et la bonne condition de la cité de Bologne et de la Société desdits Maîtres, dans le respect de l’honneur du Podestat et Capitaine de Bologne qui la gouverne, gouvernent1 ou gouverneront à l’avenir, et dans le respect des Statuts et Règlements de la commune de Bologne faits et à faire. Et que tous les Statuts ci-dessous s’appliquent désormais, à compter d’aujourd’hui, l’an 1248, indic­tion si­xième2, le huitième jour d’août.

1. - Moi, Maître du mur et de la charpente, qui suis ou serai  de la Société desdits Maîtres, je jure, en l’honneur de Notre Seigneur Jésus-Christ, de la Bienheureuse Vierge Marie et de tous les saints, et en l’honneur du Podestat et Capitaine qui est maintenant ou seront à l’avenir [en fonction], et pour l’honneur et la bonne condition de la cité de Bologne, d’o­béir et me conformer aux ordres du Podestat et Capitaine de Bologne et de tous ceux qui seront au gouvernement de la cité de Bologne, de me conformer et d’obéir à tous et chacun des ordres que me donneront le Massier3 et les officiers de la Société des Maîtres du mur et de la charpente, ou de l’un d’eux, pour l’honneur et la bonne condition de la Société, et de conserver et maintenir la Société et les membres de la Société en bonne condition, et de garder et maintenir les Statuts et Règlements de la Société tels qu’ils sont maintenant ou seront à l’avenir réglés, dans le respect en tout des Statuts et Règlements de la commune de Bologne, étant précisé que je serai tenu [par mon serment] à compter de [mon] entrée [dans la Société] et que j’[en] serai dégagé après [mon] départ.

Et si je suis appelé à la direction de la Société, je ne refuserai pas, mais j’accepterai la direction et en conscience je dirigerai, conduirai et préserverai la Société et les membres de la Société. Et je répartirai équitablement les corvées entre les membres de la Société selon ce que moi et le conseil des Maîtres jugerons convenable. Et je donnerai et ferai donner les amendes que comportent les Statuts de la Société et, en l’absence de règles statutaires, j’infligerai des sanctions selon la volonté du conseil. 

Et toutes les sanctions que j’infligerai pour quelque fait que ce soit, je les ferai inscrire dans un cahier que je transmettrai et donnerai au Massier de la Société. Et les sanctions, les fonds ou gages de la Société, les Statuts, et tout ce qu’il a d’autre par devers lui au sujet des fonds de la Société, et tous les écrits ou écritures se rapportant à la Société, le Massier est tenu, au terme que comportent les Statuts, de les remettre et donner au Massier son successeur dans l’assemblée de la Société, sous peine d’une amende de vingt sous bolonais. 

Et les contrôleurs des comptes sont tenus de contrôler cela et de prononcer une sanction dans l’assemblée de la Société [contre le Massier défaillant] à moins qu’ils n’[en] soient empêchés par une décision du conseil de la Société unanime ou à sa majorité, ou parce qu’une bonne raison existe. Et si, comme officier, je veux imposer une contribution pour les dépenses de la Société, j’[en] exposerai d’abord la raison au conseil, et elle sera imposée comme en décidera le conseil unanime ou à sa majorité.

2. - Nous statuons et ordonnons que si quelqu’un de la Société dit des propos injurieux contre les officiers ou le Massier ou contre le notaire4 ou s’il les accuse de mensonge, il soit puni de dix sous bolonais.

3. - Nous statuons et ordonnons que si quelqu’un est convoqué par les officiers, le Massier ou le Nonce5 à venir au lieu où la Société s’assemble, il soit tenu de venir chaque fois et aussi souvent qu’on le lui commandera ou ordonnera, sous peine d’une amende de six deniers. Et même s’il n’est pas requis, que chacun soit tenu de venir l’avant-dernier dimanche du mois, sans convocation, consciencieusement, sans mensonge ni tromperie. 

Qu’il n’y soit pas seulement tenu par serment, mais qu’il encoure la pénalité [ci-dessus] [même] s’il ne lui a pas été ordonné [de venir]. Et s’il est venu au lieu où la Société se réunit et qu’il s’en va sans autorisation du Massier ou des officiers, qu’il paie à titre d’amende douze deniers bolonais. A moins que, dans les deux cas, il n’ait eu un empêchement réel, ou à moins qu’il ne soit malade ou hors de la cité ou [en service] pour la commune de Bologne, auxquels cas il peut, et en d’autres cas aussi, invoquer pour excuse le serment d’obligation de service. Et s’il s’est excusé mensongèrement, qu’il soit puni de douze deniers.

4. - Nous statuons et ordonnons que la Société des Maîtres du mur et de la charpente soit tenue d’avoir huit officiers, ainsi que deux Massiers, à savoir un pour chaque [métier] de la Société ; et ils doivent être répartis équitablement entre les quartiers, et élus par listes dans l’assemblée de la Société de ma­niè­re que dans chaque quartier de la cité il y ait deux officiers, à savoir un pour chaque métier. 

Et que les officiers, avec le Massier, restent en fonction six mois et pas davantage. Et qu’ils soient tenus de faire la Société se réunir et s’assembler le second dimanche du mois sous peine d’une amen­de de trois sous bolonais chaque fois qu’ils y contreviendront, à moins qu’ils n’en soient empêchés par un réel cas de force majeure.

Nous ajoutons que le fils d’un maître de la Société ne doit ni ne peut être inscrit sur les listes électorales s’il n’a pas quatorze ans au moins. 

Et son père n’est pas tenu de le mettre dans la Société avant le temps et le fils ne doit pas être reçu dans la Société avant le temps. Et que nul ne prenne un apprenti qui ait moins de douze ans, sous peine d’une amende de vingt sous et que le contrat ainsi passé soit sans valeur.

5. - Nous statuons et ordonnons que l’on ne puisse élire officier ou Massier quelqu’un qui soit frère ou fils du votant, et que le vote émis à leur sujet soit sans valeur.

6. - Nous statuons et ordonnons que si quelqu’un de la Société doit à un autre maître une certaine somme d’argent à cause du métier, ou si un maître a une contestation avec un autre à cause du ou des métiers susdits, les maîtres qui auront ce différend entre eux soient tenus d’obéir aux ordres que les officiers des Maîtres du mur et de la charpente leur donneront pour les départager, sous peine d’une amende de dix sous bolonais.

7. - Nous statuons et ordonnons que tous les maîtres qui voudront être reçus dans la Société des Maîtres du mur et de la charpente payent à la Société dix sous bolonais s’ils sont de la cité ou du pays de Bologne ; et s’ils ne sont pas de la cité ou du pays de Bologne, qu’ils payent à la Société vingt sous bolonais. Et que les officiers mettent en conScience tous leurs soins pour que tous les maîtres qui ne sont pas de la Société y soient obligatoirement reçus. Et que cette prescription soit irrévocable, que [nul] ne puisse d’aucune façon ni manière être exempté à moins que le dixième au moins de la Société ne le décide, ou à moins qu’il ne soit le fils d’un maître, lequel peut être reçu dans la Société sans aucun paiement. 

Et si le Massier ou un officier soutenait au conseil ou à l’assemblée de la Société [la demande de] quelqu’un qui voudrait qu’on lui épargne les dix ou vingt sous bolonais à donner à la Société, qu’il soit puni de dix sous bolonais. Et si quelqu’un de la Société, siégeant dans la Société ou au conseil, se levait pour dire de quelqu’un qu’on devrait lui épargner les dix ou vingt sous bolonais, qu’il soit puni de cinq sous bolonais. 

Et si un maître a un fils ou plusieurs qui con­naissent les métiers des maîtres susdits, ou qui soit demeurés pendant deux ans à apprendre avec leur père l’un desdits métiers, alors leur père doit les faire recevoir dans la Société sans aucun [droit de] réception, en payant [lui-même] à la Société comme il est dit plus haut, sous peine d’une amende de vingt sous. Et une fois celle-ci payée, qu’il n’en soit pas moins tenu de les faire recevoir dans la Société.

Et que les officiers et le Massier soient tenus de recouvrer toutes les sommes dues par ceux qui ont été reçus dans la Société, et les quatre deniers [dûs] pour les messes, et les sanctions prononcées pendant leur temps [de fonction]. Et qu’ils les fassent prêter serment dans la Société. Et que le Massier soit tenu de recevoir du Maître qui a été admis dans la Société une bonne garantie que, dans le délai d’un mois après sa réception dans la Société, il payera dix sous s’il est de la cité ou du pays de Bologne, comme dit plus haut, [et] s’il est d’un autre territoire vingt sous bolonais. 

Et si le Massier et les officiers ne recouvrent pas ces sommes, qu’ils soient tenus de payer à la Société de leur propre argent et de lui donner une compensation suffisante en argent ou en gages pour que la Société soit bien garantie, [et cela] sous huit jours après la fin du [délai d’un] mois. Et que les contrôleurs des comptes soient tenus de contrôler tout cela comme dit plus haut et, si cela n’a pas été observé, de prononcer les sanctions que comportent les statuts de la Société. Nous ajoutons que quiconque sera reçu dans la Société payera comme droit de réception à la société vingt sous bolonais. 

Nous l’ordonnons pour ceux qui, désormais, à compter d’aujour­d’hui s’emploieront à apprendre le métier, et que cela vaille, dorénavant, à compter d’aujourd’hui, 1254, indiction douzième, huitième jour de mars. Quant à ceux qui n’auraient pas de maître pour apprendre le métier, qu’ils payent comme droit de réception à la Société trois livres bolonaises. 

8. - Nous statuons et ordonnons que nul maître du mur et de la charpente ne doit nuire à un autre maître de la Société des Maîtres en acceptant un ouvrage au forfait après qu’il lui a été assuré et for­mel- lement promis ou qu’il a eu cet ouvrage de quelque autre façon ou manière. 

Sauf que, si un maître est survenu avant que [l’ouvrage] lui ait été formellement promis et assuré et qu’il lui en demande une part, il est tenu de lui en donner une part si [l’autre] le veut. Mais si un accord a déjà été passé au sujet de cet ouvrage, il n’est pas tenu de lui en donner une part s’il ne le veut pas. 

Et qui y contreviendra, qu’il paye à titre d’amende trois livres bolonaises chaque fois qu’il y contreviendra. Et les officiers doivent donner les amendes que comportent les Statuts dans le délai d’un mois après que [l’infraction] est devenue claire et manifeste pour eux, dans le respect des Statuts et Règlements de la commune de Bologne. Et que les amendes et pénalités reviennent à l’assemblée de la Société et y demeurent.

9. - Nous statuons et ordonnons que le Massier de la Société des Maîtres soit tenu de rendre compte aux contrôleurs des comptes dans le délai d’un mois après avoir quitté sa charge, à moins qu’il n’ait une autorisation des nouveaux officiers et du conseil de la Société ou qu’il n’en soit empêché par un réel cas de force majeure. Et que le Massier soit tenu de rendre compte de toutes ses rentrées et dépenses faites et eues durant son temps. Et que tous les maîtres qui ont été reçus dans la Société durant son temps soient portés sur un cahier spécial à cet effet afin que l’on sache s’ils ont payé ou non. 

Et nous ordonnons que toutes les écritures doivent rester par devers le Massier. Et toutes les écritures se rapportant à la Société et tout ce qu’il a au sujet des biens de la Société, que le Massier soit tenu de les donner et transmettre par écrit dans l’assemblée de la Société au Massier suivant, de sorte que les fonds de la Société ne puissent en aucune façon faire l’objet d’une fraude. Et si le Massier, dans une intention frauduleuse. a omis certaines de ces [prescriptions] et ne les a pas observées, qu’il soit puni de vingt sous bolonais. Et s’il a retenu par devers lui frauduleusement des fonds de la Société qu’il restitue le double à la Société. 

En outre, que l’ancien Massier, après sa sortie de charge, soit tenu de donner et remettre au nouveau Massier absolument tous les fonds de la Société, tant les écritures se rapportant à la Société que l’argent de cette même Société le premier ou le deuxième dimanche du mois. Et le nouveau Massier ne doit pas proroger le terme pour l’ancien Massier au-delà de quinze jours. 

Et que cette prescription soit irrévocable. Et s’il y a été contrevenu par un des Massiers, qu’il soit puni de vingt sous bolonais à payer à la Société.

10. - Nous statuons et ordonnons que les contrôleurs des comptes soient élus en même temps que les officiers, et qu’ils soient [au nombre de] deux, à savoir un pour chaque [métier]. Que ces contrôleurs soient tenus de contrôler avec diligence le Massier et les officiers qui seront [en fonction] en même temps que le Massier. Et s’ils découvrent que le Massier et les officiers ont mal agi dans [l’exercice de] leur charge et qu’ils ont commis une fraude ou un dol, qu’ils les condamnent à la restitution du double des fonds découverts par devers eux, et en outre qu’ils les condamnent à restituer l’équivalent de la rétribution qu’ils ont reçue. 

Et qu’ils soient tenus d’agir ainsi et de contrôler et condamner ou donner quitus dans le délai d’un mois après la cessation de fonction du Massier et des officiers. Et, soit qu’ils condamnent ou qu’ils donnent quitus, qu’ils soient tenus de le faire par écrit dans l’assemblée de la Société. Et si les contrôleurs y contrevenaient et n’observaient pas ces [prescriptions], que chacun d’eux soit puni de dix sous et qu’ils soient exclus de leurs charges, à moins d’un réel cas de force majeure ou s’ils ont eu l’autorisation des officiers et du conseil de la Société.

11. - Afin que nulle contestation ne s’élève jamais entre les sociétaires, nous ordonnons que toutes les réformes de la Société des Maîtres du mur et de la charpente ou du conseil de la Société soient transcrites sur un cahier spécial, et que le Massier et les officiers soient tenus de le faire faire sous peine d’une amende de cinq sous bolonais.

12. - Nous statuons et ordonnons que le Massier et les officiers de la Société soient tenus de rendre compte une seule fois de toutes les rentrées et dépenses. Et après qu’ils auront été contrôlés une fois au sujet des comptes [qu’ils avaient] à rendre, qu’ils ne soient pas tenus de rendre compte davantage, à moins qu’ils ne soient dénoncés ou accusés d’avoir commis un dol ou une fraude ou d’avoir gardé illégalement par devers eux de l’argent de la commune et de la Société, auquel cas quiconque veut les accuser doit être entendu. 

Et ceux qui ont été contrôlés une fois ne doivent pas être con­trôlés davantage. Et que cette prescription s’applique tant pour le passé que pour le futur. 

13. - Nous statuons et ordonnons que tous les ordres que donneront les officiers ou le Massier ou l’un d’eux à propos de l’argent ou des autres choses relatives au métier qu’un maître doit donner à un autre maître ou faire pour lui, que ces ordres soient donnés et ordonnés dans les dix jours. Et si le maître à qui un ordre a été donné dans les dix jours ne s’acquitte pas, que les officiers et le Massier soient alors tenus dans les cinq jours après ces dix jours de donner au créancier une hypothèque sur les biens de son débiteur, afin qu’il soit complètement payé de ce qui lui revient et de ses débours. Et qu’il soit de plus puni de cinq sous bolonais si les officiers le jugent bon. 

Et que cela soit irrévocable. Et celui qui doit de l’argent à un autre maître ou à une autre personne, s’il a été convoqué ou cité par les officiers ou par le ou les nonces de la Société et qu’il n’est pas venu devant les officiers ou le Massier, qu’il soit puni à chaque fois de douze sous bolonais si on le retrouve et, si on ne le retrouve pas et qu’il est cité une deuxième fois, qu’il soit puni [de nouveau] de la même somme.

14. - Nous statuons et ordonnons que, si un maître a un ouvrage au forfait ou à la journée ou de quelque autre façon ou manière et qu’il veut avoir avec lui un autre maître pour faire cet ouvrage et travailler avec lui, le maître qui a embauché l’autre maître soit tenu de lui donner satisfaction quant à son prix [d’embauche], à moins que ce ne soit un officier ou le Massier de la Société qui mette ce maître au travail pour la commune de Bologne. Et qui y contreviendra, qu’il soit puni au gré des officiers.

15. - Nous statuons et ordonnons que les officiers et le Massier qui seront [en fonction] à l’avenir doivent avoir pour leur rétribution chacun cinq sous bolonais au bout de six mois. Et que les officiers et le Massier soient tenus de recouvrer toutes les amendes, sanctions et contributions avant de sortir de charge, à savoir chacun pour son quartier. Et s’ils ne les ont pas recouvrées dans le temps prescrit, qu’ils soient tenus de payer à la Société de leur propre argent autant au total qu’ils n’ont pas recouvré. 

Et que les officiers et le Massier soient écartés de toute charge durant un an après leur sortie de charge. Et nous prescrivons que les officiers ne reçoivent pas de gages ni d’argent, mais que le Massier reçoive intégralement la totalité des gages et de l’argent et, qu’avant leur sortie [de charge], il paye aux officiers Ieur rétribution sur les fonds des membres de la Société.

16. - Nous statuons et ordonnons que deux cierges soient achetés aux frais des membres de la Société, lesquels devront rester par devers le Massier de la Société. Et qu’ils soient de seize livres de cire en tout, et ils devront être apportés auprès du corps lorsqu’un des maîtres décédera.

17. - Nous statuons et ordonnons que si l’un de nos sociétaires est appelé ou convoqué par le Nonce ou par un autre à sa place afin de se rendre auprès d’un sien sociétaire défunt et qu’il ne s’y rend pas, il paye à titre d’amende douze deniers bolonais, à moins qu’il n’ait eu une autorisation ou un réel empêchement. Et le corps doit être porté par les membres de la Société. 

Et le Nonce de la Société doit avoir de l’assemblée de la Société dix-huit deniers par mort sur les avoirs de la Société. Et si le Nonce n’est pas allé et venu pour rassembler les sociétaires, qu’il paye à titre d’amende dix-huit deniers à la Société. Et que les officiers et le Massier soient tenus de recouvrer ces sommes.

18. - Nous statuons et ordonnons que si l’un de nos sociétaires est malade, les officiers aient le devoir de le visiter s’ils l’apprennent et de lui donner aide et assistance. Et s’il décède et qu’il n’ait pas de quoi être enterré que la Société le fasse enterrer honorablement à ses propres frais. Et que le Massier puisse dépenser jusqu’à la somme de dix sous bolonais et pas davantage.

19. - Nous statuons et ordonnons que les officiers et les Massiers qui seront [en fonction] à l’avenir, s’ils font prendre des gages sur un maître pour des contributions ou des sanctions ou d’autres motifs, perçoivent sur lui tous les frais qu’ils feront en [recourant] aux nonces de la commune de Bologne ou autrement pour les recouvrer, afin que la Société n’en ait aucun débours. Et les officiers ou le Massier qui feraient des frais pour cela, qu’ils les fassent à leur compte, à moins qu’ils ne fassent ces frais selon la volonté de la Société ou de son conseil. Et si celui qui doit verser de l’argent pour cela ne laisse pas le Nonce de la Société prendre des gages sur lui, qu’il soit puni de trois sous bolonais chaque fois qu’il y aura contrevenu.

20. - Nous statuons et ordonnons que si quelqu’un s’engage avec quel­qu’un par contrat, sans être resté et avoir accompli son temps auprès de son maître ou patron, il ne soit reçu avant le terme par aucun maître de la Société, et qu’aucune aide ou assistance ne lui soit donnée par aucun maître qui l’aura appris ou à qui il aura été dénoncé. Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de vingt sous bolonais.

21. - Nous statuons et ordonnons que nul de la Société n’aille recevoir de bénédiction qu’une seule fois. Et qui y contreviendrait, qu’il soit puni de six deniers bolonais à chaque fois6.

22. - Nous statuons et ordonnons que, si quelqu’un reçoit la bénédiction de sa propre autorité, il soit puni de six deniers bolonais chaque fois qu’il y contreviendra.

23. - Nous statuons et ordonnons que personne ne doit se tenir auprès de la corne de l’autel, tourné vers l’église, sous peine d’une amende de trois deniers chaque fois qu’il y aura contrevenu.

24. - Nous statuons et ordonnons que, si un officier ordonne à un maître de son quartier de se rendre à un travail pour la commune, en le traitant équitablement par rapport aux autres maîtres, et que [celui-ci] ne s’y rend pas, il soit puni de dix sous bolonais. Et nul maître ne doit désigner un maître quelconque du mur et de la charpente en vue d’un travail pour la commune de Bologne ou ailleurs ; et qui y contreviendra qu’il soit puni de vingt sous bolonais. 

Les officiers qui seront [en fonction] à l’avenir devront faire cette désignation en répartissant équitablement les maîtres par quartier – c’est-à-dire les officiers qui seront [présents] dans la cité lorsque la désignation se fera. Et si un officier ne traite pas équitablement un maître, commettant [à son égard] dol ou fraude, ou s’il agit [poussé] par une hostilité qu’il a contre lui, et que cela est clair et manifeste, qu’il soit puni de vingt sous bolonais. Sauf que, s’il est convoqué par le Podestat ou quel­qu’un de son entourage dans le but de s’occuper d’un ou­vra­ge pour la commune de Bologne, il pourra s’associer à sa guise sans pénalité ni amende.

25. - Nous statuons et ordonnons que nul de la Société ne doit se lever pour parler et donner son avis dans une réunion que sur ce qui sera proposé par les officiers ou le Massier. Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de douze sous bolonais, et qu’il paie incontinent cette somme ou qu’il donne un gage.

26. - Nous statuons et ordonnons que si quelqu’un fait du bruit dans une réunion après qu’un officier ou des officiers ou le Massier ou quelqu’un d’autre a fait une proposition ou pris la parole au milieu des sociétaires, s’il y a contrevenu  qu’il soit puni de trois deniers et qu’il les paie incontinent. Et que les officiers et le Massier soient tenus par serment d’agir ainsi. Et s’ils ne le perçoivent pas, qu’ils paient l’équivalent à la Société.

27. - Nous statuons et ordonnons que la Société ait un Nonce – c’est-à-dire [un pour deux quartiers et] un autre pour les deux [autres] quartierso; et ils doivent avoir, pour chacun d’eux, annuellement trente sous bolonais. Et ils doivent apporter les cierges si quelqu’un décède et aller les cher­cher au domicile du Massier. 

Et [ils doivent recevoir] un denier pour chaque commission de la part de ceux qui les en chargent.

28. - Nous statuons et ordonnons que si le défunt est du quartier de la porte Steri, les sociétaires se réunissent à Saint-Gervais. Et si le défunt est du quartier Saint-Procule, que les sociétaires se réunissent à Saint-Ambroise. En outre, si le défunt est du quartier de la porte de Ravenne, que les sociétaires se réunissent à Saint-Etienne. Et si le défunt est du quartier de la porte Saint-Pierre, que les sociétaires se réunissent à l’église Saint-Pierre. 

Et que les Nonces soient tenus, quand ils convoquent les sociétaires, de dire de quel quartier est le défunt. Et s’ils ne le disent pas, qu’ils soient punis de deux sous bolonais chaque fois qu’ils y auront con­trevenu.

29. - Nous statuons et ordonnons que chaque [membre] de la Société soit tenu de payer chaque année pour les messes quatre deniers, et que les officiers soient tenus de recouvrer ces sommes.

30. - Nous statuons et ordonnons que personne de la Société ne doit en aucune façon ni manière prendre ni garder un apprenti pour un temps moindre que quatre ans, et [à condition de lui donner] une paire de fouaces7 chaque [semaine] et une paire de chapons à la fête de Noël et vingt sous bolonais dans cinq ans. 

Et qui contreviendra au délai de quatre [ans], qu’il soit puni de trois livres bolonaises. Et qui contreviendra aux vingt sous bolonais et aux fouaces et aux chapons, qu’il soit puni de vingt sous bolonais chaque fois qu’il contreviendra à chacun [de ces points]. 

Et nous prescrivons que tous les actes soient dorénavant, à compter d’aujourd’hui, faits par le notaire de la Société en présence de deux officiers au moins, et ils doivent être transcrits dans un cahier qui restera toujours par devers le Massier. Et qui y contreviendra, qu’il paye à titre d’amende trois livres bolonaises. Et que cela soit irrévocable. 

31. - Nous statuons et ordonnons que chaque [membre] de la Société soit tenu dans [le délai d’] un an à partir du moment où il aura un apprenti de montrer l’acte aux officiers de la Société. Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de cinq sous bolonais chaque fois qu’il y con- ­tre­viendra.

32. - Nous statuons et ordonnons que personne de la Société ne puisse garder ni ne doive avoir comme apprenti quel­qu’un qui soit un domestique ou [qui soit] d’un autre territoire. Et qui y contreviendra qu’il soit puni de cent sous bolonais chaque fois qu’il y contreviendra. 

Et nous prescrivons que si quelqu’un de la Société prend pour femme une domestique, il paye à titre d’amende dix livres bolonaises et qu’il soit exclu de la Société. Et que cela soit irrévocable.

33. - Nous statuons et ordonnons que chaque maître soit tenu de faire recevoir dans la Société son apprenti après qu’il sera resté avec lui durant deux ans, et de recevoir de cet apprenti une bonne et suffisante garantie au sujet de son entrée dans la Société. Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de vingt sous bolonais chaque fois qu’il y contreviendra, du moins s’il ne reçoit pas cette [garantie]. 

34. - Nous statuons et ordonnons que personne de la Société ne doit travailler à la journée ou au forfait pour quelqu’un qui doit donner ou payer à un maître de l’argent à cause de son métier, une fois qu’il l’a appris ou que la chose lui a été dénoncée par ce maître ou par les officiers de la Société. 

Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de vingt sous bolonais par maître chaque fois qu’il y contreviendra, et qu’il paye aux maîtres [des dédommagements] pour leur travail. Et que les officiers soient tenus de donner les amendes dans les huit jours après que la chose leur est devenue claire et manifeste et de faire payer aux maîtres [les dédommagements].

35. - Nous statuons et ordonnons que la Société doit durer les dix années à venir, au total, ou davantage comme le décidera la Société ou la majorité par scrutin. 

36. - En outre nous statuons et ordonnons qu’un maître de la Société ne peut ni ne doit d’aucune façon ni manière aller devant le Podestat ou son tribunal pour se plaindre des officiers ou de l’un d’eux. Et qui y contreviendra, qu’il paye à titre d’amende trois livres bolonaises chaque fois qu’il y con­treviendra. 

Et que cela soit irrévocable.

37. - Ces Statuts ont été lus et rendus publics à l’assemblée de la Société réunie par les nonces à la manière accoutumée dans le cimetière de l’église Saint-Procule, l’an du Seigneur 1248, indiction sixième, le huitième jour d’août, au temps du seigneur Boniface de Cario, Podestat de Bologne. 

38. - Nous statuons et ordonnons que le Massier des maîtres de la charpente soit tenu de recouvrer toutes les contributions imposées et les sanctions prononcées par [lui] et les amendes [données] durant (son) temps. Et s’il ne les recouvre pas, qu’il paye de son propre argent à titre d’amende, le double. 

Et que le notaire soit tenu de recouvrer avec le Massier ces contributions, sanctions, amendes et pénalités. Et que les officiers soient tenus d’aller chacun dans son quartier [recouvrer] ces contributions, sanctions et amendes. Et le Nonce de la Société doit [y] aller avec le Massier et s’ils n’[y] vont pas, qu’ils soient punis chacun de cinq sous bolonais chaque fois qu’ils y contreviendront.

39. - Nous statuons et ordonnons que le Nonce de la Société doit rester [en fonction] une année, et qu’il ait pour sa rétribution quarante sous bolonais.

40. - Nous statuons et ordonnons que les officiers et le Massier doivent prendre un bon notaire pour la Société, et qu’il reste [en fonction] une année ; il doit inscrire les rentrées du Massier et ses dépenses et faire toutes les écritures, modifications et Statuts de la Société, et il doit avoir pour sa rétribution quarante sous bolonais. 

41. - Nous statuons et ordonnons que l’on doit faire deux livres des noms des maîtres de la charpente, et qu’il en soit dans l’un [de ces] cahiers comme dans l’autre. Et le Massier doit en détenir un, et un autre maître doit détenir l’autre. Et si un maître décède, qu’il soit rayé de ces livres.

42. - Nous statuons et ordonnons que les officiers et le Massier doivent rendre compte l’avant-dernier dimanche du mois, au-dessous de l’autel de Saint Pierre.

43. - Nous statuons et ordonnons que les officiers qui seront [en fonction] à l’avenir soient tenus chacun de faire faire un tableau des noms des maîtres de la charpente selon ce que contient la matricule. Et si les officiers envoient quelqu’un au service de la commune de Bologne, il doit y aller selon son tour afin que nul ne soit lésé, sous peine d’une amende de cinq sous chacun chaque fois qu’il y aura contrevenu.

44. - Nous statuons et ordonnons, si quelqu’un de la Société tient des propos injurieux ou outrageants à l’encontre de la Société, qu’il soit puni de vingt sous bolonais à chaque fois. Et que cela soit irrévocable. Et que les officiers soient tenus de recouvrer [ces sommes]. Et s’ils ne les recouvrent pas, qu’ils paient le double de leur propre argent.

45. - Nous statuons et ordonnons que les officiers qui seront [en fonction] à l’avenir doivent être mis à l’écart, leur charge terminée, durant un an.


Additions aux Statuts des Maîtres

46. - Nous statuons et ordonnons que la Société des Maîtres de la charpente doit se réunir à part là où le décideront les officiers de cette Société, et que la Société des Maîtres du mur doit se réunir à part là où le décideront les officiers de cette Société, et cela de telle façon qu’elles ne puissent se réunir tout ensemble. Sauf que si les officiers de ces Sociétés décident de les réunir ensemble, elles pourront se réunir. Et les officiers doivent rester ensemble pour rendre compte à tous les maîtres du mur et de la charpente qui voudront leur demander des comptes deux fois par mois, à savoir deux dimanches.

47. - En outre nous statuons et ordonnons que les quatre préposés aux Statuts qui seront [en fonction] à l’avenir aient chacun deux sous bolonais pour leur rétribution.

48. - En outre nous statuons [et ordonnons] que soit fait aux frais de la Société un cierge d’une livre qui devra brûler aux messes de la Société.

49. - En outre nous statuons et ordonnons que soient donnés chaque année aux frais de la Société à l’église Saint-Pierre, cathédrale de Bologne, en la fête de saint Pierre, au mois de juin, quatre cierges d’une livre. Et que les officiers qui seront [en fonction] à l’avenir soient tenus de s’en acquitter, sous peine d’une amende de cinq sous bolonais pour chacun d’eux.

50. - Nous statuons et ordonnons que si un maître de la Société des Maçons8 donne congé à un sien apprenti avant le terme de cinq ans, il ne puisse avoir un autre apprenti qu’une fois achevé le délai de cinq ans, sous peine d’une amende de quarante sous bolonais.

51. - Nous statuons et ordonnons que le Massier et les officiers qui seront [en fonction] au nouvel an soient tenus d’acheter un bon poêle pour la Société sur les fonds de la Société. 

Que le poêle soit porté au-dessus des [membres] de la Société qui mourront ainsi que des [membres] de la famille de ceux qui sont de la Société pour qui il sera acheté, mais pas au-dessus de quelqu’un qui n’est pas de la Société. 

52. - En outre nous statuons et ordonnons que les quatre préposés aux Statuts qui seront [en fonction] à l’avenir aient chacun deux sous bolonais pour leur rétribution.

53. - En outre nous statuons que soit fait aux frais de la Société un cierge d’une livre qui devra brûler aux messes de la Société.

54. - En outre nous statuons et ordonnons que l’on ne doit pas faire de bruit ni de querelle dans une assemblée de la Société. Et qui y contreviendra, qu’il soit puni de vingt sous bolonais.

55. - En outre nous statuons et ordonnons que la Société doit s’assembler pour toutes ses affaires à l’église Saint-Pierre ou au-dessus du palais du seigneur évêque. Et que les officiers de la Société donnent à l’église Saint-Pierre quatre des cierges d’une livre. Et que la messe de la Société soit célébrée dans cette église. 

56. - En outre nous statuons et ordonnons que, quand quel­qu’un de la Société décède, les officiers de la Société puissent avoir un et plusieurs Nonces pour faire assembler les sociétaires auprès du corps du défunt et le ou les dédommager comme bon leur semblera sur les fonds de la Société.

57. - En outre nous statuons et ordonnons que si quelqu’un ne paie pas quatre deniers bolonais pour les messes au terme qui lui est fixé par les officiers, il verse le double au Nonce qui ira à son domicile pour recouvrer cette somme.

58. - En outre nous statuons et ordonnons que tous les Statuts de la Société soient copiés de nouveau et que là où [l’on dit] les officiers du mur et de la charpente on dise seulement du mur, de façon que les statuts de la société du mur soient distincts de ceux de [la société de la charpente. Et que cela soit irrévocable.

59. - En outre nous statuons et ordonnons que si un [membre] de la Société ne donne pas au Nonce de la Société un gage lorsque cela lui est demandé de la part des officiers, on ne doit pas travailler avec lui, sous peine d’une amende de vingt sous bolonais chaque fois qu’on travaillera avec lui, à moins qu’il ne vienne à se conformer aux ordres des officiers.

60. - En outre nous statuons et ordonnons [que] le notaire de la Société ait pour sa rétribution au bout de six mois vingt sous bolonais et pas davantage.

61. - En outre nous statuons et ordonnons que les contrôleurs des comptes doivent avoir pour leur rétribution cinq sous bolonais et pas davantage.

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NOTES

1 - Le Podestat est un magistrat civil, qui est chargé de la police et de la justice ; le Capitaine commande la force armée. En 1248, un seul homme, Bonifacio de Cario, remplit les deux fonctions.

2 - Indiction sixième - Sixième année du pontificat d’Innocent IV (1195-1254).

3 - Massier - Officier élu chargé de l’administration et des finances de la Société.

4 - La Société des Maîtres du mur et de la charpente dispose d’un notaire, faisant office de secrétaire, ses membres ne sachant sans doute ni lire ni écrire, ou du moins n’ayant aucune connaissance du latin.

5 - Nonce - En principe, représentant du pape ; ici il s’agit d’un délégué de l’autorité.

6 - Il semble que les articles 21, 22 et 23 concernent les cérémonies de bénédiction organisées lors des travaux de construction.

7 - Fouace - Galette de pain ordinairement cuite sous la cendre.

8 - Lu dans le texte : si aliguis magister societatis muratorum – si un maître de la Société des « Maçons »…


(Remerciements de l’auteur à Jean-François Var pour sa transcription et sa traduction des Statuts de Bologne).

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